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8 novembre 2012

12 La jouissance d'être (bis) (J'ai trouvé le mode d'emploi)

Nom d’un petit bonhomme, me suis-je dit à moi-même dans mon for intérieur, la décortication de l’idéologisme par Misrahi est franchement explicite. On ne peut pas faire plus lumineux. Pour tout dire, ces explications m’ont transpercé au point de me transformer en idéologisant repenti. Mea Culpa, on ne m’y reprendra plus, c’est promis. Par la suite, j’ai persévéré et dévoré à petites doses quotidiennes les autres chapitres de ce livre. Eh bien, figurez-vous, ma vie s’en est trouvée métamorphosée. Je vous assure que c’est la vérité. Cet essai m’a (enfin) permis de la comprendre, ma vie. Bien plus que de la comprendre, de me l’expliquer. Vous vous rendez compte, je suis tombé sur le mode d’emploi de ma vie ! Que demander de plus ? D’un seul coup d’un seul (après bien des efforts et des difficultés quand même), pfff, toute angoisse m’a quitté, comme un évier se débouche brutalement dans un rot d’enfer. Je me demandais toujours quelle était cette force à laquelle je ne pouvais résister et qui m’avait tiré toute ma vie par le bout du nez, jusqu’à parfois me mettre dans des situations des plus extravagantes. Misrahi l’appelle le Désir avec un D majuscule. Tout est dans la majuscule, car il nous mène à sa guise. À force de fouiller, j’ai fini par décrypter celui qui m’habite. Il était temps ! Ça faisait un moment que je m’étais échoué sur les récifs du ressentiment. L’ignorance est une chose, s’en rendre compte en est une autre. Car le ressentiment, voyez-vous, ça vous ronge jusqu’à l’os, ça vous aliène dans l’esprit de vengeance-revanche, si ce n’est dans la rage-désespérance, en un mot, ça vous détruit lentement mais sûrement quand vous êtes sa proie. Et par voie de conséquence, vous polluez votre entourage. Il n’est pas bon pour la santé physique et mentale de ressasser que sa vie est un échec et d’en vouloir à la terre entière. Pas plus qu’il n’est sain de se prendre pour une victime.

le cri

(Petit rappel sur l’idéologisme pour commencer) P 294 : L’idéologie (…) est une réflexion tronquée, partielle, qui ampute la réalité qu’elle ne perçoit qu’à travers des œillères. (…) Cette préférence dogmatique et conceptualisante se double d’une préférence méthodologique : la sélection des informations, l’arbitraire des observations et des raisonnements expriment non seulement la spécificité égocentrique du Désir, mais encore la décision effective de ne retenir que les faits « favorables » à la vision idéologique, et d’en intensifier l’importance par rapport aux autres faits tenus pour secondaires ou inexistants. (…) le découpage arbitraire de la réalité, le choix arbitraire de cela qui sera considéré comme important (le Pouvoir, le Führer, l’État, la Révolution) et de cela qui sera ou négligé ou considéré comme négligeable (l’existence personnelle, le sujet, la liberté, le bonheur, la justice, la réciprocité). (…) L’idéologie  est, en tout état de cause, une pensée facile : elle fuit la difficulté de l’information véritable et du raisonnement authentique, elle fuit la difficulté de la sortie hors de soi et de la véritable dialectique spéculaire. Elle est, en somme, aisément satisfaite d’elle-même dans son insuffisance et sa partialité : elle est une forme de la complaisance à soi. (…) mais aussi une pensée méprisante et négatrice : l’autre et sa souffrance, l’autre et son malheur, l’autre et sa spécificité sont pour elle des fantômes inexistants auxquels elle préfère les certitudes aveugles de sa violence et de son mépris. (…) Pas plus dans ce cas que dans le précédent l’idéologie ne conduit à une transformation de la modalité qualitative de l’existence en crise : celle-ci reste morcelée, malheureuse et angoissée. Et le malheur, comme doute ou déception, ou terreur du vide, est accru par l’échec objectif et historique de ces idéologies. Incapable de se constituer comme voie pour un salut personnel, l’idéologie est également incapable de construire une solution politique à ce problème issu de la modalité empirique de l’existence : le problème de la crise comme désespoir ou comme malheur. Les intellectuels nazis se sont parfois suicidés, ils ont toujours fui ; les intellectuels communistes ont parfois quitté leur Parti et ont vécu cette sortie comme une rupture dramatique et comme une forme de mort. Mais ils n’étaient pas plus vivants au sein du Parti, puisqu’ils devaient lui soumettre leur puissance de pensée et leur liberté réflexive. Soumis et aliénés, ils se saisissaient comme des héros ascétiques, opprimés par la seule bourgeoisie, mais chassés et exclus, ils se considéraient comme des orphelins ou comme des victimes.

 

Et dire que je n’avais même pas compris que je ne faisais déjà plus partie des vivants. Et là, soudain, je revivais, je revenais vers la vie. Mais quel était donc ce miracle ? L’effort sur soi de compréhension. La recherche de la vérité. La volonté d’arrêter toute fuite en avant. Etc. Je ne vais pas vous en faire un bouquin. Je vous soumets cette dernière citation destinée à vous inciter, si jamais vous étiez intéressés, à découvrir ce qu’est ce fameux Désir, et surtout la gueule du vôtre. 

lever de soleil

(si si, c'est une photo prise au soleil levant)

P 157 Mais toute cette construction, cette angoisse de la « mort » et de la nuit, ou bien de la solitude et de l’ennui, n’est en effet qu’une construction spéculaire et libre de la conscience désirante. Elle n’est que la spéculation sur sa mort et sa solitude, le résultat d’une activité spéculaire en miroir qui s’effraie de l’image qu’elle suscite d’elle-même, au sens où cette image n’est issue que d’elle-même, et au sens où cette image n’est en effet que le reflet de sa propre angoisse antérieure, c'est-à-dire de sa propre réflexivité en tant qu’elle se nie et se détruit déjà elle-même. (…) la souffrance et l’angoisse niant qu’elles soient leur propre origine, opèrent le renversement spéculaire qui permet d’attribuer à l’Autre (dieu, puissance, esprit, sorcier), c'est-à-dire à quelqu’un et à une Autre conscience, l’initiative, la responsabilité et l’efficacité maléfique qui sont sensées menacer la vie même des êtres humains, alors qu’elles ne sont rien d’autre que l’expression dédoublée, expulsée et renversée de la propre appréhension du sujet par lui-même. Ce dont il a peur et ce dont il s’angoisse, ce qui l’opprime et l’enchaîne, qu’il l’appelle dieu, destin, karma, faute, métempsychose ou nuit cosmique, ce n’est rien d’autre que lui-même renversant en angoisse funèbre l’âpre désir de plénitude et de vie porté à sa plus extrême intensité au cœur de sa plus extrême fragilité.

Robert Misrahi, la jouissance d’être, Encre Marine

la jouissance d'être 1

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