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9 février 2014

77 La muette

La muette est la vie même. Elle est la vie en elle-même écrasée sous la botte d’un Mental Tyrannique extérieur, en d’autres termes, une idéologie oppressive totalitaire qui, en Iran, sévit sous la forme du pouvoir tentaculaire des mollahs. Ils oppriment le peuple du dedans comme du dehors. Du dedans, par la pensée répressive intégrée de la belle-sœur de la Muette qu’elle héberge, et du dehors par l’inquisition permanente des envoyés du Comité du quartier pauvre où habite la famille. Car les mollahs, voyez-vous, vivent du commerce de la foi. Ils ont à cœur de faire fonctionner ce petit commerce au mieux. C’est ainsi que les jugent beaucoup d’habitants du quartier. Les autres abritent un mollah en eux. Ces gens-là n’ont qu’un seul désir, posséder le corps de la femme, aussi bien pour sa beauté, sa sensualité, sa sexualité, que par le fruit de ses entrailles, la perpétuation du mollah lui-même. Cette Muette symbolise la Femme dans ce qu’elle est. Et la femme dans ce qu’elle est ne peut rien faire d’autre, pour survivre, qu’entrer en résistance contre les mollahs, ce qui la condamne par avance. Il n’y a aucune échappatoire. On devine que pour cette raison la muette est devenue et restée muette.

 

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« J’ai quinze ans, je m’appelle Fatemeh mais je n’aime pas mon prénom. Je vais être pendue bientôt… » C’est par ces mots que commence le récit atroce et hautement symbolique, qu’a écrit depuis sa prison la nièce aimée de la muette. Son histoire fustige en des mots simples décrivant la condition générale de la femme, toute cette monstrueuse société. Tout est dans ce grand livre qui se lit en à peine un peu plus d’une heure. Ne le manquez pas.

De la volonté, la muette n’en manquait pas ; seuls des êtres d’une intelligence médiocre, comme ma mère, pouvaient sous-estimer son opiniâtreté ; elle qui s’était obstinée dans le silence pendant des années ! Elle avait décidé de mettre un terme à ce projet de mariage avec le mollah ; et elle l’avait fait d’une façon radicale. Elle s’était offerte à l’homme qu’elle aimait, sans rien lui demander en échange. Un acte plus que révolutionnaire pour une femme, et pas seulement dans notre milieu, mais dans ce pays où l’amour est toujours l’honneur des frères et des pères, une affaire de contrat et d’arrangement, un simple commerce. Dans ce pays où l’amour est interdit.

Chahdortt Djavann, La muette, j’ai lu

 

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