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17 mars 2014

81 Deep South !

 

À quelques semaines d’intervalle, je découvre le Sud profond américain (sans jamais y mettre les pieds), à travers les regards acérés et bardés d'humour de deux chipies, au demeurant fort différentes. Leurs deux visions sont déjà décalées en ce qu’elles vivent leur Sud (Alabama et Mississipi) à trente ans de distance. Il faut cependant lire entre les lignes pour décrypter une éventuelle évolution de cette société sudiste au niveau des mentalités, car cela ne saute pas vraiment aux yeux. 

Le Sud profond est tout aussi raciste à ces deux périodes pourtant si éloignées dans le temps. Presque autant que cent ans auparavant, juste après l’abolition de l’esclavage, pour la première période dont il est question ici.

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En réalité, ces deux chipies (Harriet et Jean Louise) n’ont pas beaucoup de points communs, mis à part d’être nées dans le Sud américain, d’avoir quasiment le même âge et de surgir de la plume de deux écrivaines, car elles se démènent dans des situations totalement différentes. La chipie la plus récente chronologiquement, Harriet (voir le « blues de la chipie », chronique n°75) se débat dans un environnement immédiat (sa famille) déstructuré au sein d’une société étouffante, tandis que la plus ancienne, Jean Louise, celle qui nous intéresse dans cette chronique, est plongée dans une société où règne une sorte d’apartheid et la haine des Noirs. Mais pour elle, un petit miracle se produit, elle profite d’un père lumineux (Atticus) qui défend lui-même les Noirs en tant qu’avocat. Pour Dona Tartt (le petit copain, chronique n°75), un déterminisme implacable et meurtrier agit sur son héroïne Harriet, tandis qu’ici, chez Harper Lee, en 1930, agit une relative liberté individuelle qui prétend que personne n’est obligé d’intégrer dans sa vision personnelle du monde les préjugés racistes, religieux ou sociaux, même s’ils sont bien ancrés dans la majorité « silencieuse », (très bruyante en réalité).

 

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Dona Tartt

 

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Harper Lee

 

Car les préjugés prolifèrent dans cette société comme dans toutes sociétés, y compris la nôtre aujourd’hui. C’est ce qui interpelle : la lutte contre les préjugés est permanente et les avancées dans cette lutte relatives. Je trouve un fond commun entre ces deux romans remarquables (à tous points de vue) et notre réalité d’aujourd’hui. Je remarque que les préjugés sont toujours intimement liés à une évidente rigidité émanent de la religion chrétienne, tant protestante que catholique, en tant qu’institution. Les préjugés, qui génèrent tant d’injustices et de malheurs pour une catégorie d’êtres humains, s’appuient toujours sur de hautes justifications morales en lien avec la religion. Étrange phénomène. Ce qui n’empêche pas les protagonistes de ces romans qui s’opposent aux préjugés d’être souvent eux-mêmes croyants. Ce que je comprends car à mes yeux, un chrétien, ne devrait pas se laisser dominer par ses préjugés.  

-Tu vas retirer ça, et vite !

Cet ordre que je donnai à Cecil Jacobs marqua le début d’une période pénible pour Jem et moi. Les poings serrés, j’étais prête à le frapper. Atticus m’avait promis que, s’il apprenait que je m’étais encore battue, il me ferait définitivement passer l’envie de recommencer ; j’étais beaucoup trop grande pour m’adonner à de tels enfantillages et plus vite j’apprendrais à me contenir, mieux ce serait pour tout le monde. Cela me sortit vite de la tête. Ce fut la faute de Cecil Jacobs. La veille, il avait annoncé dans la cour de récréation que le père de Scout Finch défendait les nègres. Je niai, mais en parlai à Jem.

-Qu’est-ce qu’il voulait dire ? demandai-je.

-Rien. Interroge Atticus, tu verras.

Ce que je fis le soir même.

-Tu défends les nègres, Atticus ? lui demandai-je le soir même.

-Bien sûr. Ne dis pas « nègre », Scout, c’est vulgaire.

-Tout le monde dit ça, à l’école.

-Désormais, ce sera tout le monde sauf toi…

-Eh bien, si tu ne veux pas que je parle de cette manière, pourquoi m’envoies-tu à l’école ?

Mon père me regarda, l’air amusé.

Harper Lee, Ne tirez pas sur l’oiseau moqueur, le livre de poche, traduit de l’anglais par Isabelle Stoïanov

Roman vendu à plus de trente millions d’exemplaires à travers le monde !

 

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