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31 août 2016

173 Terreur enfouie

Adolescent, j’adorais les films de western. Je prenais parti pour les Indiens (quand il y en avait), même quand ils étaient présentés comme des bêtes sauvages et féroces. Je les préférais de loin aux colons chrétiens civilisés. Peu de westerns présentaient les Indiens sous un angle sympathique. Malheur aux vaincus.

 

indien et nature

Bien plus tard, j’ai adoré Little Big Man d’Arthur Penn que j’ai dû voir plus de cinq fois. J’appréciais surtout les moments où Dustin Hoffman « était » Indien. J’ai toujours trouvé les Indiens plus authentiques et dignes d’intérêt que les  civilisés christianisés (comme la sœur de John Crabb-Dustin Hoffman, incarnée par Faye Dunaway). Avec le style de vie indien, nous ne serions certainement pas au bord du gouffre sur le plan écologique comme nous le sommes avec le style civilisé. Voilà que je succombe aux lapalissades. Il faut reconnaître que la civilisation chrétienne, sûre d’elle et dominatrice pendant des siècles, a détruit pas mal d’autres civilisations dans ce monde (au nom de leur Dieu tout-puissant bien sûr). Aujourd’hui, son avatar islamiste (et le petit frère ultra-orthodoxe israélite) promet encore davantage, sinon l’apocalypse, toujours au nom de leur « Dieu est Grand ». Tous ces mortels mortifères complètement dépassés par le monde moderne (égalité entre homme et femme, fraternité entre êtres humains croyants ou non, liberté de pensée et d’opinion), font un dégât monstre et cruel pour tenter de résister, de prouver qu’ils existent, de ne pas disparaître à jamais dans les poubelles de l’Histoire, un peu comme les groupuscules gauchistes vers la fin du communisme.

Ce que j’imagine de commun entre Paddon Sterling et moi, c’est cette terreur enfouie au plus profond de nous de ne pas parvenir à réaliser ce pour quoi on imagine être arrivé sur terre. Cette source d’angoisse distille son poison lent et empêche souvent de se prendre pour un homme normal qui vit normalement sa vie faite de bonheurs et de malheurs dans l’instant présent.

Paddon Sterling est Canadien, vit sur une terre expurgée des Indiens Blackfoot, mais tombe raide amoureux d’une indienne nommée Miranda qui lui remet les idées à l’endroit sur la civilisation blanche.

Quoi ? Qui c’est qui a découvert le pôle Nord, Paddon ? (…)

Robert Peary, répondis-tu avec méfiance, flairant le piège. Tu veux dire qu’il était seul ? Bien sûr que non. Il était avec qui ? Tu soupiras encore – était-ce cela qu’elle voulait te faire dire ? Avec son aide de camp noir Matthew Henson et quatre guides esquimaux. Quatre quoi ? Quatre guides esquimaux. Si c’étaient des guides, c’est qu’ils y étaient déjà allés ? demanda Miranda sur un ton triomphal et tu poussas un grognement d’indignation. (…) Tu ne connais même pas les noms de ces esquimaux, déclara-t-elle. Peut-être qu’ils se baladaient autour du pôle depuis des années ! Et sous prétexte qu’un blanc déclare que c’est un pôle, c’est lui qui devient célèbre.

Nancy Huston, Cantique des plaines, Babel.

cantique des plaines

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