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25 avril 2013

39 Quelle actualité !

Je n’y suis pour rien, je suis tombé sur un livre dont on pourrait considérer qu’il colle à l’actualité, alors qu’il a été publié en 2011, il y a si longtemps déjà ! C’est son titre, à vrai dire, qui m’a tapé dans l’œil, à moins que ce soit une alerte de mon petit doigt, au choix.

le voilier zaz

Je connaissais l’auteur de nom car il chronique dans Libération où je l’avais déjà lu. Je ne savais cependant rien sur lui ni sur son environnement. J’aurais pourtant dû. Rendez-vous compte, rien sur son père, pourtant connu, rien sur son vrai-faux-père fondateur, archi-connu, rien sur ses (nombreux) amis et amants, tous plus ou moins connus, rien, a fortiori, sur son histoire, c’est simple, j’ai honte. Je me suis lancé dans la lecture sans préjugé et sans la moindre préparation. Il en aurait peut-être fallu une, comme on a intérêt à s’entraîner quand on veut pratiquer l’apnée. Ce n’est qu’un exemple. Je ne savais pas de quoi ce roman traitait, car le verbe aimer, qui figure en bonne place dans le titre, est à la fois clair, comme il peut tout aussi bien être vague. Et bien, mes ami-e-s, je me suis retrouvé englouti par un monde qui m’a bouleversé. On dit souvent d’un livre qu’il est bouleversant. Là, je l’ai senti passer dans mes tripes. C'est-à-dire que l’auteur me les a remuées et secouées, même si ce fut d’une délicate façon. Je ne sais pas s’il l’a cherché, en tout cas il a réussi. Au fond, ce livre traite d’une amitié lumineuse, en période de sida hécatombe, c'est-à-dire au tout début, ainsi que d’homosexualité. Vous allez aussitôt penser, mon pauvre garçon, en tant qu’homo refoulé, tu as été touché, et coulé ! Et bien, je rétorque banalement, vous n’y êtes pas du tout. Sur les trois termes cités (amitié, sida, homosexualité), c’est l’amitié qui l’emporte de loin. L’amitié, c’est pareil à l’amour, (retranché de la sexualité), c’est trangressif parce qu’incontrôlable et subversif. C’est l’anti-ronron couple/famille. L’amitié, c’est la liberté rayonnante, c’est la vie dans ce qu’elle a de plus beau, de plus fort, de plus exaltant. À la limite, on peut tout laisser tomber sauf l’amitié. Allez ! Presque tout ! C’est ainsi que je le vis.

michel foucault

(l'ami : Michel Foucault)

Comme par hasard, mais je ne crois pas trop au hasard, au même moment, je tombe sur la chronique de Marcela Iacub du samedi 20 avril dans Libération, dont je ne résiste pas à m’octroyer une citation : le plus beau sentiment que nous sacrifions sur l’autel du familialisme est l’amitié, transformée en un lien secondaire et léger. Ainsi dit-on des personnes entourées d’amis mais qui ne vivent pas en famille qu’elles sont seules, alors que d’autres, qui connaissent le « foyer familial » mais n’ont pas d’amis, sont censées avoir tout ce qu’il leur faut.

herve guibert

(le deuxième ami : Hervé Guibert)

Il y a autre chose aussi d’omniprésent dans ce roman, il faut le dire, et encore mieux l’écrire, c’est l’usage, abondant, de la drogue : acide, LSD, héroïne. L’auteur en parle avec une honnêteté stupéfiante ! Des bons comme des mauvais trips. De la préparation nécessaire, du partage entre amis, de la maîtrise du trip et même de certains échecs craignos.    

Certains esprits peut-être aigris, ou trop engagés dans la struggle for live façon je baise tout le monde pour arriver au sommet penseront que ce que j’écris sur l’amitié est candide, à la limite de la naïveté et que sais-je encore. Certains lecteurs de ce roman vont appeler candeur ce que je trouve honnête et sincère. D’autres vont affubler l'auteur, ce « fils de » d’une arrogance de circonstance, de mec qui n’a pas eu à se battre pour obtenir ses premiers postes. Peu importe à mes yeux, ce que cet auteur m’a apporté vaut mille fois plus que ces critiques même si elles sont plausibles.

Zaz 11 Port-vendres coucher ce soleil

(pour mon plaisir)

En vérité, la proximité la plus grande que j’ai eue fut avec Michel Foucault et mon père n’y était pour rien. Je l’ai connu six ans durant, jusqu’à sa mort, intensément, et j’ai vécu une petite année dans son appartement. Je vois aujourd’hui cette période comme celle qui a changé ma vie. Je suis reconnaissant dans le vague à Michel, je ne sais pas exactement de quoi, d’une vie meilleure. La reconnaissance est un sentiment trop doux à porter : il faut s’en débarrasser et un livre est le seul moyen honorable, le seul compromettant. Quelle que soit la valeur particulière de plusieurs protagonistes de mon histoire, c’est la même chose pour chacun dans toute civilisation : l’amour qu’un père fait peser sur son fils, le fils doit attendre que quelqu’un ait le pouvoir de le lui montrer autrement pour qu’il puisse enfin saisir en quoi il consistait. Il faut du temps pour comprendre ce qu’aimer veut dire.

Mathieu Lindon, Ce qu’aimer veut dire, folio

ce qu'aimer veut dire

 

PS : je crains que nous vivions une période de régression !

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